Boulet rouge par Michel TURK

Des nouvelles de Lorraine

Boulet rouge par Michel TURK

24 août 2023 Non classé 1

Mercredi 23 août 2023

Je ne suis pas spécialement de caractère versatile, mais je prends actuellement des décisions sur lesquelles ça ne me poserait pas de gros problèmes existentiels que de revenir dessus. Oui, je m’éloigne du monde de l’écriture, peut-être parce que j’ai enfin compris que le Goncourt ne sera pas pour moi. Non, mauvais humour, en fait c’est tout ce qui touche à la diffusion des ouvrages qui me fait prendre du recul. Le livre est un produit, les grandes maisons d’édition sont des championnes du marketing et de publicité, autant de supports assurant une solide diffusion. J’étais en train d’écrire un nouveau polar, des faits à peine romancés qui reprenaient des affaires que j’ai instruites. Si habituellement les délinquants ne brillaient pas par leur esprit mais se révélaient surtout comme étant de gros lourdauds bien basiques et violents, dans l’affaire que je relate, il y avait quand même un peu d’imagination. Bref, passons. Tournons la page.

Mes « boulets rouges » continueront d’accueillir mes ires et mes rires suivant mes dispositions d’esprit. Encore qu’un clin d’œil sur notre monde ne donne pas souvent l’occasion de s’esclaffer. Comme pronostiqueur, j’ai souvent été dans le camp des perdants, mes analyses géopolitiques se seraient donc avérées fausses. Mais je persiste et signe : le Yankee est arrogant, insolent, et sa mentalité de cow-boy me fait jusqu’à pisser en bleu-blanc-rouge, tant j’ai le sentiment que les bannières étoilées qui bientôt ne formeront plus (ou ne forment déjà plus) qu’une, nous lamineront, ne laissant de nos valeurs qu’un vague musée du souvenir pour personnes âgées.

Heureusement, il me reste le monde aviaire pour m’envoler un peu. Oh, pas bien haut, je ne suis pas Icare, mes ailes de cires ne fondront pas au soleil. Les oiseaux, je les observe et si, parfois avec Raymonde, nous nous laissons aller à prêter à tel ou tel comportement quelque signification anthropomorphique, je garde les pieds sur terre (vous voyez, mon envol est de courte durée) et ne fait que constater. Ils sont chou. Ils ont une vie sociale, un instinct de reproduction qui les fait se pomponner, se soigner, chanter pour séduire. Ils nourrissent leurs petits, instinct maternel presque toujours, paternel chez certaines espèces comme le grèbe huppé, les éduquent et de voir une femelle nette rousse donner la leçon à sa progéniture alignée devant elle presqu’au garde à vous, ça vous remue. Je veux dire, ça me remue, parce que franchement, ça ne remue pas beaucoup de monde. « Mais on ne savait pas » que nos compagnons aviaires sont décimés, que l’équilibre de la nature est en jeu. Sachez regarder un pinson qui s’égosille au sommet d’un sapin pour dire à sa belle tout l’amour qu’il lui porte, une sterne se faire désirer par son futur compagnon en exigeant de lui la plus élémentaire offrande, ce poisson qui sera gage de la nourriture des futurs oisillons. Et si vous voulez encore un peu plus de poésie pour vous émouvoir si peu, lisez J. Prévert, « pour faire le portrait d’un oiseau », et peut-être comprendrez-vous.

Oui, bec croisé, pas pinson. Mais, qu’importe le bec pourvu qu’on ait l’oiseau… (Crédit M. Turk)

Une réponse

  1. Manette dit :

    Savoir prendre de la hauteur est souvent signe de sagesse à croire que ceux qui restent au sol ne font qu’y traîner leurs bassesses.
    Il nous reste les mots, il nous reste les oiseaux ça n’est déjà pas si mal et il nous faut prendre soin des uns et des autres qui sont en grand danger c’est vrai.

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