L’oiseau qui fait souffler la brise

Des nouvelles de Lorraine

L’oiseau qui fait souffler la brise

10 mai 2021 La route des coucous 2
photo Michel Turck

Sa maison est souvent une mer orageuse et froide  et il   passe la plus grande partie de sa vie dans les airs au-dessus des océans. C’est le plus légendaire des oiseaux, à la réputation ambigüe aussi bien porteur de bon que de mauvais présage. A l’aube des temps, lorsque l’homme se risquait à aller sur les immensités marines, les dangers étaient tels qu’il se bardait de toutes les protections possibles et imaginables et les marins étaient réputés pour être les plus superstitieux des hommes.   L’albatros hurleur (il pousse des cris perçants) peut peser jusqu’à 10 kg et son envergure est de 3.90 mètres ce qui en fait peut être un marcheur veule mais un planeur exceptionnel qui ne  bat pratiquement jamais des  ailes, sauf à l’envol. Les marins croient qu’ils peuvent les aider à naviguer dans les eaux difficiles. Si un albatros prend le vent, la mer sera bonne et les courants favorables, s’il se pose près du bateau, il attire le mauvais œil. Il ne faut jamais nettoyer les excréments que l’albatros lâche sur le pont mais les laisser sécher.

A gauche l’albatros, à droite une mouette (photo M. Turck)

Selon une croyance, chaque oiseau de mer étant habité par l’âme d’un marin, tuer un albatros est particulièrement funeste : le poète anglais Samuel Taylor Coleridge évoque cette idée dans La Chanson du vieux marin (1798) :

« Et j’avais fait une chose infernale.

Et cela devait leur porter malheur

Car tous assuraient que j’avais tué l’oiseau

Qui faisait souffler la brise

« Ah malheur ! disaient-ils : tuer l’oiseau

Qui faisait souffler la brise ! »

Pour prouver la réalité de cette superstition, on rappelle ce qui survint en 1959, à bord d’un navire devant conduire un albatros de l’Antarctique jusqu’en Allemagne. La mort de l’oiseau, survenue peu après que le bateau eut pris la mer, fut le prélude à une série d’ennuis, tempêtes, pannes de moteur, etc. Le navire, dont la capitaine attribua les infortunes à la mort de l’albatros, n’arriva jamais en Allemagne et dut finir sa course à Liverpool.

L’albatros vit pendant plusieurs dizaines d’années (jusqu’à 50 ans pour certaines espèces).

Socialement, les albatros sont à la fois orientés vers la communauté et loyaux. Ils prennent le temps de choisir le bon compagnon, et quand ils le font, ils célèbrent l’acte avec une valse de mariage. La danse de chaque couple est unique et se développe au fil du temps, une sorte de langage individuel qui cimente un lien de couple qui dure toute la vie. Avec un taux de divorce de 0%, ils sont les oiseaux les plus fidèles dans le règne animal. Ce n’est pas un hasard si le meilleur coup de golf porte le nom de l’albatros : ils volent plus haut, plus vite et apportent plus de droits de vantardise que l’aigle et le birdie !  

En 2004, une étude a montré que l’oiseau le plus rapide a parcouru 22 545 kilomètres en seulement 46 jours sans repos. Et pourtant : « Ses ailes de géant l’empêchent de marcher » Baudelaire

2 réponses

  1. TURK michel dit :

    Rencontres très émouvantes que celles de certains oiseaux. Ce matin-là, ma femme m’avait lancé une boutade, « aujourd’hui tu vas photographier l’envol d’un albatros », mais elle n’y croyait pas elle-même. Et voilà le bel oiseau bercé par la houle qui semblait n’attendre que le moment où je serais prêt pour décoller à la façon des oies ou des cygnes, c’est-à-dire en courant sur l’eau et en battant des ailes. Et de ce moment-là j’ai compris pourquoi tant de poètes s’en était inspirés. Non, ça c’est faux! Je n’ai pas attendu ce moment-là!

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