20 mars 2021

Des nouvelles de Lorraine

20 mars 2021

20 mars 2021 Celle qui est en moi 2

Le plus dur reste à faire : le printemps va venir et il va falloir vivre avec. Il passe son temps à me guetter au coin de la rue. Ses signaux se succèdent à un rythme effarant : ce sont les perce-neige, les pâquerettes, les primevères qui se haussent courageusement du col entre deux averses vaguement enneigées. Les narcisses se tiennent sur une élégante réserve, conscientes de leur valeur et de leur fragilité. Les forsythias débordent de bonne volonté dans un jaune pointu et se verraient bien les grands triomphateurs. L’hirondelle fait la pluie et le merle fait le beau. Le grand chat roux du voisin surgit de nulle part et y retourne sans hésiter, La vision d’un plein champ de coucous et de boutons d’or, non pas encore mais bientôt. La campagne lorraine est constituée de solides collines rompues à toutes les intempéries et soucieuses de rester à leur place jusqu’à la fin des temps. Dans les villages, les plus anciennes maisons se tiennent encore au garde à vous sans pouvoir estimer combien de temps elles se maintiendront ; certaines penchent vers l’avant pour s’assurer un équilibre compromis par les siècles. En réalité, il ne se passe pas grand-chose : tout est lent, mesuré, apaisant. Le monde flotte agréablement à l’abri des jacinthes et des tulipes plantées d’hier qui offrent leurs fleurs peu crédibles à tous les regards. Incroyable ce qu’une fleur de tulipe peut protéger des turpitudes du monde ordinaire. Peut-être que cette année, je refuserais l’été qui s’annonce tellement chaotique et que j’irai directement à l’automne. Dessiner des coccinelles au soleil.

2 réponses

  1. TURK michel dit :

    J’apprécie, très beau texte.

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